La ligne Ontario s’appuiera sur de la technologie éprouvée plutôt que sur des prototypes futuristes

La récente publication de l’analyse de rentabilité initiale pour la ligne de métro Ontario

10 sept. 2019

Mathieu Goetzke – et même son fils adolescent – aime lire sur le projet de navettes futuristes électriques à haute vitesse du multimilliardaire Elon Musk.

Pourtant, d’après M. Goetzke, chef de la planification de Metrolinx, lorsque le métro de la ligne Ontario ouvrira ses portes aux navetteurs de Toronto, ceux-ci ne devraient pas s’attendre à une vision révolutionnaire similaire à celle de Musk, qui compte offrir des capsules défilant à plus de 240 km par heure dans des tunnels de villes américaines par l’entremise de son entreprise, The Boring Company.

Pourquoi? Bien que le projet de transport en commun repose sur des idées rentables et novatrices élaborées selon un modèle de partenariat public-privé (P3) – où différentes visions se disputent le droit de construire le métro –, la décision s’appuiera sur des techniques, des mécanismes et de l’équipement éprouvés.

Le métro de Paris utilise des trains automatisés.

« Nous ne testons pas de nouvelles technologies, a révélé M. Goetzke. Nous voulons nous assurer d’utiliser une technologie fiable qui offre la capacité désirée. »

À titre d’exercice de réflexion, M. Goetzke et son fils (qui est aussi amateur de transport en commun) ont fait le calcul pour conclure que la ligne Ontario transportera beaucoup plus de gens que le système de Musk, soit 389 000 embarquements par jour. La priorité du nouveau métro est la capacité totale.

« L’objectif du P3 est d’être ouvert à une variété de solutions solides (qui ont été testées) à Vancouver, Paris, Londres, Shanghai ou Tokyo, explique Goetzke. Il y a différents fabricants, différents exploitants, différentes conceptions… de la technologie éprouvée ailleurs qui a la fiabilité dont nous avons besoin pour nos navetteurs. »

Becca Nagorsky, directrice de la planification du projet de la ligne Ontario de Metrolinx, ajoute : « Nous ne tentons pas d’attirer les gens qui cherchent un projet en démonstration. Nous voulons aider les gens à se rendre au travail. »

Cela ne veut pas pour autant dire que la nouvelle ligne (comprenant 15 stations potentielles, dont six stations de correspondance, et ajoutant 17 nouvelles possibilités de correspondance avec GO Transit, les métros et les tramways) ne comprendra pas d’éléments modernes qui n’étaient pas une option lors des anciens projets. Les planificateurs prévoient des trains entièrement automatisés et sans conducteur dotés d’une signalisation moderne qui permet un service à haute fréquence, similaires à la technologie utilisée à Paris, Londres et Singapour.

Le nouveau métro de Toronto utilisera une technologie éprouvée. Le métro de Paris est présenté.

Tout est pensé pour accroître la capacité. Grâce au système automatisé, où circuleront constamment des trains plus courts (s’arrêtant devant des plateformes de seulement 100 mètres de long), le temps d’attente entre chaque train pourra passer de deux minutes à 90 secondes.

Selon Goetzke, les centres de commande perfectionnés et l’automatisation permettront d’ajouter rapidement des trains à la ligne durant les périodes d’utilisation massive – comme lorsqu’une équipe sportive de Toronto se rend en série éliminatoire ou qu’une célébration populaire attire les foules au centre-ville de Toronto.

Le système fonctionne également à l’inverse, dans la mesure où il dessert de petits groupes pendant les heures creuses. Goetzke a préalablement travaillé à titre de planificateur de transport en commun et de vice-directeur municipal à Lille, en France – une communauté de travailleurs et de travailleuses. Le système automatisé de la ville permet au personnel de l’hôpital régional de se rendre au travail en train dès 5 h.

« Grâce à l’automatisation, on peut accroître nos heures de pointe de manière considérable et répondre aux besoins de portions de la population qui ne sont habituellement pas bien desservies par le transport en commun, parce qu’elles se déplacent hors des heures normales de bureau », explique-t-il.

Les plateformes de la ligne Ontario seront bordées de portes qui s’ouvriront pour laisser les passagers entrer dans les trains. Le système sera très similaire à celui d’UP Express, qui relie l’aéroport international Pearson à la gare Union du centre-ville de Toronto. La présence d’aires d’attente désignées et de points d’arrêts précis devant les portes aura l’effet d’accélérer l’embarquement.

Pour un système dont la priorité est la capacité, les portes présentent également l’avantage d’être plus sécuritaires et de réduire la présence de déchets sur les voies.

Cette technologie, certes de pointe, n’est pas nouvelle. Des milliers de kilomètres de voies de métro automatisé sont construits dans d’autres pays, dont la Chine.

La résilience climatique est une autre sphère où la technologie pourra offrir des solutions, notamment la construction de marquises au-dessus des voies de guidage surélevées exposées aux éléments. 

Des pneus de caoutchouc peuvent aussi être envisagés sur les voitures de métro. Utilisés dans le métro de Paris, ils aident à diminuer les vibrations et les bruits et à monter des dévers plus à pic. Par contre, ils peuvent glisser lorsqu’ils sont exposés à des éléments extérieurs ou mouillés, a précisé M. Goetzke.

Ceci étant dit, Mme Nagorsky insiste sur le fait que les détails des composants de la ligne Ontario seront choisis afin de pouvoir transporter les gens de manière rapide, sûre et rentable.

« Dans le cadre du modèle de P3, ce qui nous importe est de permettre aux gens de se déplacer, a affirmé Mme Nagorsky. La composition des pneus ne nous importe pas. Si le secteur privé croit que les pneus de caoutchouc sont la meilleure solution, très bien. S’ils pensent que les roues en acier sont la meilleure solution, encore une fois, très bien. »

« Peu importent les véhicules. Ce qui nous importe, c’est qu’ils passent fréquemment et qu’ils se rendent à destination. »

À l’occasion de notre prochain article sur la ligne Ontario, nous verrons quels systèmes de transport en commun autour du monde développent des réseaux automatisés et lesquels d’entre eux peuvent servir de modèles pour le prochain grand réseau de métro de Toronto.

Pour lire notre article sur l’analyse de rentabilité de la ligne Ontario, cliquez ici.